Tuesday, 27 October 2015

14. Lucienne Saboulard †

Voici les paroles que notre président Jean Dassié a prononcées en éloge à sa soeur au cours de ses obsèques le 11 juin 2015:
2 décembre 1926 - 5 juin 2015

Lucienne Saboulard était ma soeur. Pour moi la seule et unique. Nous n'étions que tous les deux, enfants chéries d'une famille unie où, au quotidien, la paix et l'amour régnaient sans partage. La cruauté de la guerre a fait exploser cette situation idyllique.

Tout d'abord notre père, grand patriote et valeureux combattant de la guerre 14/18 ne pouvait accepter la défaite de 1940. Il retrouva sa dignité et son espérance en intégrant le réseau COMETE chargé plus spécialement d'aider les pilotes alliés abattus dans le nord de l'Europe.

Notre mère, en épouse vigilante, compris et découvrit très vite les nouvelles activités de son époux. Elle accepta sans la moindre hésitation de seconder son mari. Et toi, ma soeur, tellement près de notre mère, héritière du patriotisme de notre père, tu t'engageas dans cette nouvelle aventure avec résolution et la désinvolture de la jeunesse. Tu avais 16 ans et, déjà, tu voulais vivre libre.

Cette soi-disant aventure ne durait, hélas, que quelques mois pour les membres du réseau COMETE. Les arrestations suivirent. Vinrent alors pour toi et nos parents les interrogatoires interminables, les sévices et pour terminer les camps de concentration.

Tu as passé 2 ans d'horreur à Ravensbruck, tu y as vécu l'indescriptible et côtoyé l'impensable et tu avais 17 ans. Tu as eu la volonté et le courage de résister à cette démolition savamment programmée de l'être humain. Tu es revenue tellement affaiblie que la médecine te donnait peu de chance. Encore une fois tu as combattu le mauvais sort et malgré la maladie, tu as repris brillamment tes études. Le bilan de cette aventure a été très lourd.

Nos parents décédés, toi marquée à vie et moi orphelin pratiquement depuis l'âge de 7 ans. Mais toi LULU, ma grande soeur, tu m'as pris sous ta protection pour tenterd'adoucir mon chagrin, au cours de cette période encore trouble de l'après-guerre.

Tu incarneras pour moi et pour toujours l'image du courage, de la volonté mais aussi celle d'une tendre affection même pudique. Tu n'aimais pas les honneurs. Ta légendaire discrétion était à l'image de celle de tous les membres du réseau COMETE, ce qui en a toujours fait, d'ailleurs, sa particularité.

Pourtant j'aurais tellement aimé poursuivre nos conversations sur ton vécu quand tu décidais, enfin, d'ouvrir parfois ton coeur. Maintenant que tu n'es plus là, que tu vas rejoindre un monde que j'espère meilleur, peut-être aurons nous l'occasion de les reprendre quand, un jour, je te rejoindrai. Peu de temps avant que tu me quitte, tu m'as dit. Il faut faire face en toutes circonstances. J'essaierai de m'en rappeler pour être digne de toi.

-oOo-

Mr Jean Dassié, the president of our association "Les amis du réseau Comète", gave the following moving eulogy during the funeral of his dear sister Mme Lucienne Saboulard, “Lulu”..
  
Lucienne Saboulard was my sister. For me, the one and only. There were only two beloved children in our close family where, daily, peace and love reigned unchallenged. This idyllic upbringing was to be blown away by the cruelty of war.

Firstly, our father - a great patriot and brave combatant who fought in WWI - could not accept the defeat of 1940. He regained his dignity and hope by joining the Comet Line to help repatriating Allied pilots shot down in northern Europe.     

Our mother, a watchful wife, soon discovered and understood her husband's new activities. Without hesitation, she decided to help her husband in his activities. And you, my sister, so close to our mother and imbued with our father's patriotism, joined in this new adventure with determination and the carefree spirit of youth. You were 16 years old and already you wanted to live free. 

Unfortunately, this so-called adventure lasted only a few months for members of the Comet Line. The arrests soon followed. For you and our parents, this led to endless interrogations, brutal treatment and then finally the concentration camps.

You spent 2 years of horror at Ravensbrück where, at the age of 17, you experienced the indescribable and were exposed to the unthinkable. You had the inner resources and courage to resist this carefully planned destruction of humanity. At the war's end you emerged so weakened that doctors did not hold out much hope for you. Again, you fought your broken health and, in spite of the sickness, you were able to resume your studies brilliantly. The outcome of this adventure was indeed heavy. 

Our parents had gone, you were scarred for life and I was orphaned almost from the age of 7 - but you LULU, my big sister, you took me under your wing to try to ease my sorrow during the troubled period after the war. 

To me, you will always be the incarnation not only of courage and willpower, but also of affectionate tenderness and modesty. You were not interested in honours. Your legendary discretion was that of all members of the Comet Line, that has always distinguished their deeds.                      

Yet I would have loved to continue our conversations on your experience when you decided at last to open your heart sometimes to me. Now that you're gone, I hope you are going to join a better world - and perhaps we'll have the opportunity to resume when I will join you one day. Shortly before you left me, you said to me that we have to confront all circumstances. I'll try to remind myself of that to be worthy of you.


-oOo-     

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